Introduction à la polarisation
Dans de nombreuses applications optiques, il est essentiel de comprendre et de manipuler la polarisation de la lumière. La longueur d’onde et l’intensité lumineuse sont souvent au cœur de la conception optique, au détriment de la polarisation. Cependant, la polarisation constitue une propriété importante de la lumière qui affecte même les systèmes optiques qui ne la mesurent pas explicitement. La polarisation de la lumière affecte la mise au point des faisceaux laser, influence les longueurs d’onde de coupure cut-off des filtres et peut s’avérer importante pour empêcher les rétroréflexions indésirables. Elle est essentielle dans le cadre de nombreuses applications métrologiques, telles que l’analyse des contraintes du verre ou du plastique, l’analyse d’ingrédients pharmaceutiques et la microscopie biologique. Diverses polarisations de la lumière peuvent également être absorbées à différents degrés par des matériaux, ce qui représente une propriété essentielle pour les écrans LCD, les films 3D et les lunettes de soleil antireflets.
Comprendre la polarisation
La lumière est une onde électromagnétique dont le champ électrique oscille perpendiculairement à la direction de sa propagation. La lumière est considérée comme non polarisée lorsque la direction de ce champ électrique fluctue de manière aléatoire dans le temps. De nombreuses sources lumineuses courantes telles que la lumière du soleil, l’éclairage halogène, les projecteurs LED et les ampoules à incandescence produisent une lumière non polarisée. Lorsque la direction du champ électrique de la lumière est bien définie, on parle alors de lumière polarisée. La source la plus répandue de lumière polarisée est le laser.
Selon l’orientation du champ électrique, nous classons la lumière polarisée en trois types de polarisations :
- Polarisation linéaire : le champ électrique de la lumière est confiné sur un plan unique dans la direction de propagation (Figure 1).
- Polarisation circulaire : le champ électrique de la lumière est constitué de deux composants linéaires perpendiculaires l’un à l’autre et d’amplitude égale mais présentant une différence de phase de π/2. Le champ électrique qui en résulte effectue une rotation autour de la direction de propagation et, en fonction de la direction de rotation, est appelé lumière à polarisation circulaire à droite ou à gauche (Figure 2).
- Polarisation elliptique : le champ électrique de la lumière décrit une ellipse. Cela résulte de la combinaison de deux composants linéaires avec des amplitudes différentes et/ou une différence de phase qui n'est pas π/2. Il s’agit là de la description la plus courante de la lumière polarisée. Les lumières polarisées de manière circulaire et linéaire peuvent être considérées comme des cas particuliers de lumière à polarisation elliptique (Figure 3).
Figure 1 : le champ électrique de la lumière polarisée de manière linéaire est confiné sur le plan y-z (gauche) et le plan x-z (droite), dans la direction de propagation.
Figure 2 : le champ électrique de la lumière polarisée de manière linéaire (gauche) comprend deux composants linéaires perpendiculaires d’amplitude égale qui ne présentent pas de différence de phase. L’onde du champ électrique résultant se propage sur le plan y = x. Le champ électrique de la lumière polarisée de manière circulaire (droite) comprend deux composants linéaires perpendiculaires d’amplitude égale qui présentent une différence de phase de π/2 ou de 90°. L’onde du champ électrique résultant se propage de manière circulaire.
Figure 3 : le champ électrique circulaire (gauche) comprend deux composants d’amplitude égale qui présentent une différence de phase de π/2 ou de 90°. Cependant, si les deux composants présentent différentes amplitudes ou s’il existe une différence de phase autre que π/2, alors ils créeront une lumière à polarisation elliptique (droite).
Les deux états de polarisation linéaires orthogonaux les plus importants pour la réflexion et la transmission sont appelés polarisation p et polarisation s. La lumière polarisée p (de l’allemand parallèle) présente un champ électrique polarisé parallèle au plan d’incidence, tandis que la lumière polarisée s (de l’allemand senkrecht, perpendiculaire) est perpendiculaire à ce plan.
Figure 4 : P et S sont des polarisations linéaires définies par leur orientation relative par rapport au plan d’incidence.
Manipulation de la polarisation
Polariseurs
Pour sélectionner une polarisation de lumière spécifique, on utilise des polariseurs. Les polariseurs peuvent être globalement divisés en polariseurs réfléchissants, dichroïques et biréfringents. Vous trouverez plus d’informations détaillées sur le type de polariseur le mieux adapté à votre application dans notre Guide de sélection de polariseurs.
Les polariseurs réfléchissants transmettent la polarisation souhaitée tout en réfléchissant le reste. Les polariseurs à grille métallique en sont un exemple courant. Elles sont constituées de plusieurs fils fins disposés de manière parallèle. La lumière polarisée le long de ces fils est réfléchie, tandis que la lumière qui est polarisée de manière perpendiculaire à ces fils est transmise. Les autres polariseurs réfléchissants utilisent l’angle de Brewster. L’angle de Brewster est un angle d’incidence spécifique sous lequel seule la lumière polarisée s est réfléchie. Le faisceau réfléchi est polarisé s et le faisceau transmis devient partiellement polarisé p.
Les polariseurs dichroïques absorbent une polarisation de lumière spécifique, transmettant le reste ; les polariseurs de nanoparticules modernes sont des polariseurs dichroïques.
Les polariseurs biréfringents s’appuient sur la dépendance de l’indice de réfraction sur la polarisation de la lumière. Diverses polarisations réfracteront à différents angles et cela peut être utilisé pour sélectionner certaines polarisations de lumière.
La lumière non polarisée peut être considérée comme une combinaison aléatoire de lumière polarisée s et de lumière polarisée p variant rapidement. Un polariseur linéaire idéal transmet une seule des deux polarisations linéaires et réduit ainsi l’intensité non polarisée initiale I0 de moitié,
Pour la lumière polarisée avec une intensité de I0, l’intensité transmise via un polariseur idéal, I, peut être décrite par la loi de Malus,
Où θ est l’angle entre la polarisation linéaire incidente et l’axe de polarisation. Nous constatons que pour les axes parallèles, la transmission est réalisée à 100%, tandis que pour les axes de 90°, également connus sous le nom de polariseurs croisés, la transmission est de 0%. Dans les applications réelles, la transmission n’atteint jamais exactement 0%, les polariseurs sont caractérisés par un rapport d’extinction, qui peut être utilisé pour déterminer la transmission réelle via deux polariseurs croisés.
Lames d’Onde
Tandis que les polariseurs sélectionnent certaines polarisations de lumière, rejetant les autres polarisations, les lames d’onde idéales modifient les polarisations existantes sans atténuer, dévier ni décaler le faisceau. Elles effectuent cela en retardant (ou reportant) un composant de polarisation par rapport à son composant orthogonal. Pour vous aider à déterminer la lame d’onde la mieux adaptée à votre application, consultez Comprendre les lames à retard. Les lames à retard bien choisies peuvent convertir tout état de polarisation en nouvel état de polarisation et sont le plus souvent utilisées pour la rotation de polarisation linéaire, pour convertir la lumière polarisée de manière linéaire en lumière polarisée de manière circulaire ou vice versa.
Applications
La mise en place du contrôle de polarisation peut être utile dans de nombreuses applications d’imagerie. Les polariseurs sont placés sur une source lumineuse, un objectif, ou les deux, pour éliminer l’éblouissement lié à la lumière dispersée, augmenter le contraste et éliminer les taches lumineuses des objets réfléchissants. Cela permet d’obtenir une couleur ou un contraste plus intense, ou cela aide à mieux identifier les défauts présents sur la surface ou d’autres structures masquées.
Réduction des taches lumineuses réfléchissantes et de l’éblouissement
Dans la Figure 5, un polariseur linéaire a été placé devant l’objectif dans un système de vision industrielle par ordinateur pour éliminer l’éblouissement obscurcissant afin qu’une puce électronique puisse apparaître clairement. L’image de gauche (sans polariseur) montre une lumière polarisée de manière aléatoire, dispersée sur les nombreuses surfaces de verre entre l’objet et le capteur de la caméra. La plus grande partie de la puce est obscurcie par la réflexion de Fresnel de la lumière non polarisée. L’image de droite (avec polariseur) montre la puce sans que l’éblouissement n’obscurcisse les détails de l’objet, permettant à la puce d’être visionnée, analysée et mesurée sans obstruction.
Figure 5 : un polariseur est placé devant l’objectif de la caméra de vision industrielle, réduisant la lumière parasite provenant d’une surface réfléchissante entre l’objectif et la puce électronique.
Le même phénomène est visible dans la Figure 6. Dans l’image de gauche (sans polariseur), la lumière non polarisée provenant du soleil interagit avec les fenêtres du bâtiment d’Edmund Optics et la majeure partie de cette lumière se réfléchit sur les fenêtres. Dans l’image de droite, un filtre polarisant a été appliqué de sorte que la lumière réfléchie, enrichie d’un type de polarisation, bloque le capteur de la caméra et le photographe, à l’aide de l’autre type de polarisation, peut voir plus facilement à l’intérieur du bâtiment.
Figure 6 : un polariseur est placé devant l’objectif d’un appareil photo reflex mono-objectif numérique, réduisant l’éblouissement provenant d’une surface partiellement réfléchissante des feuilles sur la végétation.
Un autre moyen caractéristique pour voir la manière dont les polariseurs réduisent les reflets consiste à regarder la surface de l’eau. Dans la Figure 7, la surface de l’eau présente des reflets dans l’image de gauche, obscurcissant ce qui se trouve sous la surface. À droite, cependant, les débris rocheux présents au fond du plan d’eau apparaissent bien plus nettement.
Figure 7 : un polariseur est placé devant l’objectif d’un appareil photo reflex mono-objectif numérique, réduisant l’éblouissement provenant de la surface partiellement réfléchissante de l’eau.
Les taches lumineuses constituent des portions très réfléchissantes d’un champ à l’intérieur d’un champ réfléchissant plus diffus. Dans la Figure 8, un polariseur est placé devant l’objectif d’une caméra ainsi que sur la source lumineuse illuminant la scène pour réduire les taches lumineuses.
Figure 8 : un polariseur linéaire est placé sur la source lumineuse tandis qu’un autre polariseur, perpendiculaire au premier, est placé sur l’objectif de la caméra pour éliminer les taches lumineuses.
Grâce à la polarisation croisée de deux polariseurs linéaires perpendiculaires, les taches lumineuses peuvent être réduites, voire complètement éliminées.
Figure 9 : ce système d’imagerie représente l’un des moyens permettant d’éliminer ou de réduire la dispersion, l’éblouissement ou les taches lumineuses. La source lumineuse est polarisée par le polariseur et la lumière réfléchie qui sera imagée est polarisée une fois de plus, par l’analyseur cette fois-ci.
La différence angulaire entre les axes de polarisation des deux polariseurs est directement liée au volume d’atténuation lumineuse générale de l’ensemble de polariseurs. En changeant l’angle d’offset, la densité optique de l’ensemble de polariseurs peut varier, offrant ainsi un effet similaire à l’utilisation d’un filtre à densité neutre. Cela garantit que le champ global soit illuminé de manière uniforme.
Amélioration des effets de contraste et de couleur
Les anneaux lumineux sont des sources lumineuses prisées en raison de leur illumination uniforme et diffuse. Toutefois, l’éblouissement ou la réflexion de l’anneau lui-même peut se produire. La polarisation de la sortie de l’anneau lumineux et de l’objectif séparément peut réduire ces effets et faire ressortir les détails de la surface somme indiqué dans la Figure 9.
Figure 10 : la polarisation de la sortie de l’anneau lumineux et de l’objectif séparément peut fortement réduire l’effet d’éblouissement pour révéler des détails importants de la surface.
La Figure 11 montre une photo prise du siège d’Edmund Optics et la variation de couleur du ciel, de l’herbe et du feuillage obtenue avec ou sans l’utilisation d’un polariseur devant l’objectif d’une caméra. Puisque les électrons présents dans les molécules d’air dispersent la lumière dans plusieurs directions, le ciel apparaît sans polariseur d’une teinte plus claire de bleu, comme illustré dans l’image de gauche (sans polariseur). En outre, les surfaces des feuilles des arbres et des brins d’herbe sont très légèrement réfléchissantes. L’utilisation de polariseurs permet de filtrer une partie de la lumière réfléchie par ces surfaces, obscurcissant la couleur perçue.
Figure 11 : en photographiant le ciel, un polariseur placé devant l’objectif peut considérablement altérer la couleur du ciel.
Évaluation de la contrainte
Dans les solides amorphes tels que le verre et le plastique, la contrainte des profils de température et de pression dans le matériau provoque des variations et des gradients localisés au niveau des propriétés du matériau, le rendant biréfringent et non homogène. Cela peut être quantifié dans les objets transparents à l’aide de l’effet photoélastique, car la contrainte et la biréfringence associée peuvent être mesurées à l’aide des méthodologies de lumière polarisée.
Figure 12 : une paire de lunettes apparaît clairement sans polarisation ; l’utilisation de polariseurs rend toutefois visible les variations de contrainte matérielle qui apparaissent sous forme de variations de couleur.
Les objets clairs sans contrainte placés entre les polariseurs croisés doivent produire un champ complètement noir, mais, en présence d’une contrainte matérielle interne, les changements localisés dans l’indice de réfraction entraînent la rotation de l’angle de polarisation, générant alors des variations de transmission.
Identification chimique
Le contrôle de la polarisation est également très important au sein des industries chimique, pharmaceutique et de l’alimentation et des boissons. De nombreux composés chimiques organiques, tels que les ingrédients pharmaceutiques actifs ou les sucres, possèdent plusieurs orientations. L’étude des molécules présentant diverses orientations s’appelle la stéréochimie.
Les composés moléculaires présentant le même type et le même nombre d’atomes, mais différentes dispositions des molécules, portent le nom de stéréoisomères. Ces stéréoisomères sont « actifs optiquement » et feront pivoter la lumière polarisée dans différentes directions. L’ampleur de la rotation est déterminée par la nature et la concentration du composé, permettant à la polarimétrie de détecter et de quantifier la concentration de ces composés. C’est la condition pour identifier quel stéréoisomère peut être présent dans un échantillon, ce qui est important car les stéréoisomères peuvent avoir des effets chimiques très différents. Par exemple, le stéréoisomère limonène est le composé chimique qui donne aux oranges et aux citrons leurs senteurs caractéristiques.
Figure 13 : Le (+)-limonène, ou d-limonène (gauche), est associé à l’odeur des oranges car les oranges ont une concentration plus élevée de ce stéréoisomère que les autres. Le (+)-limonène provoque la rotation de l’orientation de la lumière incidente. Le (-)-limonène, ou l-limonène (droite), est associé à l’odeur des citrons, car sa concentration y est élevée et il fait pivoter la lumière incidente dans la direction opposée au (+)-limonène.
Microscopie de polarisation
Plusieurs techniques de microscopie telles que la microscopie à contraste interférentiel différentiel (CID) utilisent les polariseurs pour obtenir différents effets.
Dans un système de microscopie de polarisation simple, un polariseur linéaire est placé devant une source lumineuse de microscope, sous la platine porte-objet, pour polariser la lumière pénétrant dans le système. Un autre polariseur placé au-dessus de la platine porte-objet est appelé « analyseur », car il est tourné pour obtenir un effet souhaité lors de l’analyse de l’échantillon et pendant que le premier polariseur reste fixe. L’analyseur est alors tourné de sorte que les plans de polarisation de l’analyseur et du polariseur soient espacés de 90°. Une fois que cela a été effectué, le microscope présente une transmission minimale (polariseurs croisés) ; le volume de transmission lumineuse sera proportionnel au rapport d’extinction du polariseur et de l’analyseur.
Une fois que l’analyseur a été aligné de manière perpendiculaire au polariseur, un échantillon anisotrope ou biréfringent est placé sur la platine porte-objet. L’échantillon fait pivoter la lumière polarisée d’une ampleur désignée, proportionnelle à l’épaisseur de l’échantillon (et ainsi la distance du trajet optique) et à la biréfringence de l’échantillon, avant que la lumière n’atteigne l’analyseur.
L’analyseur ne transmet que la lumière ayant subi un changement de phase induit par l’échantillon et continue de bloquer toutes les lumières non affectées de la source ayant été initialement polarisée par le polariseur. Si la biréfringence de l’échantillon est connue, elle peut alors être utilisée pour déterminer l’épaisseur de l’échantillon. Si l’épaisseur de l’échantillon est connue, elle peut être utilisée pour déduire la biréfringence de l’échantillon. Un graphique pratique utilisé à cette fin est connu sous le nom d’échelle des teintes de Michel-Lévy dans la Figure 14.
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